Pacifique… magnifique.
Voilà quelques semaines que nous sommes revenus de cette parenthèse océane mais nous n’avons pas encore vraiment accosté. Là-bas, nous nous sentions loin de tout, aux antipodes de l’agitation que nous venions de quitter en métropole, sur une terre de France où les journaux parisiens arrivent quand ça leur chante. Ici, la nouvelle du jour, c’est la métamorphose d’un Rond Point névralgique de Nouméa pour améliorer la circulation aux heures de pointe. On change déjà de tempo, et la petite musique de l’insularité commence à vous gagner. Ces retrouvailles ont quelque chose de différent, ici même la crise semble moins présente. Notre dernière visite remonte à 26 ans, en 1984, à l’aube des événements qui allaient marquer la Nouvelle Calédonie du sceau de la violence, juste avant la crise d’Ouvéa, que les accords de Matignon étaient parvenus à résoudre. C’est dans cette relation apaisée entre les communautés réconciliées que nous redécouvrons Nouméa, après avoir survolé la moitié de la planète, et atterri en France, au bout du monde. Jean-Claude Briault, ministre du gouvernement calédonien, nous ouvre son pays avec un sourire si large qu’il suffit de se laisser porter pour embarquer à ses côtés et comprendre son dévouement, sa passion communicative.
Pour ce 4è Forum Francophone de l’Océanie, il a déployé son talent à convaincre plus de 40 Alliances Françaises de toute l’Océanie (jusqu’à l’Australie et la Nouvelle Zélande…) de se rencontrer, certaines pour la première fois. Dans l’arc Mélanésien où les langues sont si diverses qu’on ne se comprend pas d’une vallée à l’autre, le français est devenu un lien entre les îles, l’espace commun entre les peuples. Salon du Livre, expositions de créateurs, tables rondes, le Vanuatu était l’invité d’honneur de cette édition 2010. Côté musique, le Conservatoire de la Nouvelle Calédonie, dirigé par Jean-Pierre Cabée, avait organisé notre concert en clôture du Forum. L’accueil du public était à la mesure du défi, intense, chaleureux, émouvant et musical : un quatuor à cordes du Conservatoire s’est joint à nous sur la scène, pour ajouter encore du plaisir à cette fête, en faisant de ces concerts un véritable échange, passionnément orchestré par Bruno Zanchetta, directeur adjoint du Conservatoire.
(en fin d’article, écoutez “Fragile”, en extrait sonore du concert)
Côté curiosité, une ballade toutes voiles dehors en catamaran (merci Philippe !) nous a conduits jusqu’à l’îlôt Aregnère, où nous avons plongé comme dans un aquarium parmi les poissons muticolores, plané à côté d’une tortue et croisé deux requins, sur un récif coralien aux massifs bleutés, dans un jardin de fleurs sous-marines…
Pour Jean-Pierre Cabée, qui nous a guidés tout au long de cette aventure partagée, impossible de ne pas faire honneur au Centre Culturel Tjibaou, chef d’œuvre d’architecture mêlant tradition et création, où Renzo Piano (architecte du Centre Pompidou, de l’Aéroport d’Osaka, de la Tour Aurora à Sidney…) a concrétisé la phrase prophétique de Jean-Marie Tjibaou : «Le retour à la tradition est un mythe. Aucun peuple ne l’a jamais vécu. La recherche d’identité, le modèle, pour moi, il est devant soi, jamais en arrière. C’est une reformulation permanente. L’identité elle est devant nous.»… Expression de la reconnaissance de l’inspiration kanak, symbole d’une Nouvelle Calédonie tournée vers l’avenir, le Centre rassemble aussi dans un parcours nature toutes les essences spécifiques de l’île, tous les arbres chargés d’histoire, de légendes et de magie.
A l’île des Pins, à 20 minutes de vol de Nouméa, on se rapproche de l’image du paradis sur Terre… La « plus belle plage du monde » déroule son sable coralien, le plus fin qu’on puisse trouver sur la planète, comme un coussin d’air sous nos pieds… C’est là aussi que nous faisons connaissance avec le tricot rayé, serpent placide et de bonne composition, emblématique de la région, mais dont le venin mortel est quatre fois plus puissant que celui du cobra…
Toute l’équipe a conclu ce superbe voyage, jalonné d’amitié, de découverte et d’échanges, avec une grande envie de revenir, malgré la longueur du trajet (24h dans chaque sens) et le sommeil qui depuis nous poursuit, sans doute pour mieux nous replonger dans le rêve éveillé de cette parenthèse où les grèves se sont muées en plages…
“Fragile” enregistré avec le quatuor à cordes du Conservatoire de Nouméa
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